You are currently viewing Aventure photographique à Cuba

Aventure photographique à Cuba


Réhahn retourne à Cuba tous les ans pour y revoir des amis, fumer des cigares à la célèbre Casa del Habano et photographier les personnages les plus incroyables de Cuba. Voici les histoires se cachant derrière les célèbres portraits ainsi qu’un guide de voyage sur l’un des endroits les plus chers au monde dans le cœur de Réhahn.

Cuba en Photos

A La Havane, le présent semble se heurter à l’histoire. Au milieu des Chryslers des années 1950 et des emblèmes communistes du passé, il existe une force dynamique.

Kennedy et Castro. Voitures classiques et Cohibas. La fumée de cigare s’échappant des cafés en tournoyant lentement, envahissant l’air avec leur odeur de café brûlé.

Je repère une vieille affiche de propagande collée sur une façade rose effritée. Le visage iconique de Che fixe les publicités des complexes hôteliers balnéaires collées sur le bâtiment de l’autre côté de la rue. C’est ainsi que j’admire Cuba depuis la banquette arrière de la voiture de mon nouvel ami Edel. Nous traversons les boulevards pour sortir de la ville, passant devant de vieux bâtiments et des enfants qui jouent au football dans la rue. Quelques notes du Son de la Ma Teodora s’échappent d’une maison que nous dépassons.

PORTRAITS DE FUMEURS DE CIGARES

Cuba cigar smoker photo by Réhahn
Cuba cigar smoker photo by Réhahn
Cigar smoker Cuba portraits Rehahn photograph

EDEL

J’ai fait mon premier voyage à Cuba en 2007. J’étais attiré par l’histoire de ce pays qui était sur le point d’entrer dans une nouvelle ère. Edel est apparu lorsque j’ai demandé à mon hôtel un chauffeur de taxi sachant parler anglais. Jovial, philosophe et cultivé sur tous les sujets de la géopolitique à l’agriculture, Edel était le compagnon de voyage parfait.

Lors de cette première rencontre, j’ai demandé à Edel de m’amener dans la campagne. Il était habitué à conduire les touristes autour de Varadero pour admirer les belles plages. Mais je recherchais quelque chose de plus authentique, un voyage en dehors des zones touristiques et dans le vrai Cuba.

Edel m’a demandé si je fumais le cigare. A ce moment-là, je n’avais jamais fumé de ma vie mais j’ai accepté sans hésitation. Quel meilleur moyen d’expérimenter Cuba qu’en s’adonnant à l’un de ses plus vieux rituels avec un nouvel ami ?

PHOTOGRAPHIC JOURNEYS IN CUBA 6 1

Il est descendu de la voiture et a sorti du coffre une boîte de cigares sans marque. Ils étaient simples et roulés à la main, faits de tabac cultivé par des locaux. Il m’a appris à fumer sans inhaler. Puis, comme si je m’y connaissais complètement tel un vrai cubain, il a commencé à devenir philosophe. Il m’a expliqué le rituel de fumer un cigare, telle une personne qui parlerait de poésie.

Depuis ce voyage, je suis retourné à Cuba 15 fois pour revoir Edel et photographier le pays. En 2011, je lui ai acheté une maison afin qu’il puisse s’occuper de sa santé affaiblie à cause des complications du diabète. A chaque fois que je le vois, nous partageons nos histoires et les cigares, laissant le temps s’écouler lentement.

cuba photography rehahn 36

L’ART DE FUMER UN CIGARE CUBAIN

Les vrais amateurs de cigares ne les fument pas pour se montrer. Ils les fument pour se sentir bien. Pour un cubain, fumer un cigare est aussi important que de savourer un verre de Bordeaux pour un français.

Il s’agit d’un instant réconfortant à la fin de la journée, un moment pour se détendre et apprécier les bonnes choses de la vie. Le plaisir provient également du sentiment de fierté pour leur pays et leur patrimoine.

J’ai fumé mon premier cigare, et plus tard ce jour-là, j’en ai fumé un autre. Le premier était assez puissant pour me faire tourner la tête. La seconde fois, j’ai commencé à m’habituer à l’intensité de la fumée et à véritablement apprécier. Je suis désormais passé aux élégants Cohibas. J’en achète des boîtes entières pour fumer lorsque je suis à Cuba et les ramener au Vietnam. Les Cohibas sont fabriqués avec soin et fierté. Chaque cigare passe par environ 222 étapes durant le processus de fabrication avant d’être prêt pour la vente. Le goût est l’une des raisons pour laquelle je me suis tourné vers cette marque, mais j’aime également le mythe qui les entoure.

UN COURT HISTORIQUE DE COHIBA

En 1966, quatre ans après le détournement de la Crise des Missiles de Cuba, le garde du corps de Fidel Castro lui offrit un cigare. Il était sans marque et composé du tabac cubain le plus raffiné. Castro apprécia tellement le mélange qu’il décida de lancer une production limitée pour les hauts fonctionnaires et diplomates. Il les nomma Cohiba, le nom Taino pour cigarette. Les Tainos étaient un peuple indigène des Caraïbes. Ils étaient le premier peuple d’Amérique que Christophe Colomb rencontra lors de son expédition en 1492.

Je ne fume pas les Cohibas pour leur statut culte. Pour moi, il s’agit d’une porte d’entrée dans la culture, un moyen d’interagir avec les gens. Tous les cubains connaissent leur nom et leur histoire, même s’ils n’ont jamais eu l’opportunité d’en fumer un. Ces cigares, avec leur emblématique étiquette jaune, m’ont accompagné au cours de nombreuses aventures inoubliables. Ils m’ont aidé à faire de nouvelles connaissances et à créer des souvenirs avec mes vieux amis. Ils font partie intégrante de mon expérience à Cuba.

ELVA

J’ai rencontré Elva lors d’une de mes promenades photographiques matinales dans la Vieille Havane. Elle m’avait remarqué avant même que je ne la repère.

« Si tu veux une photo, tu devras me donner quelque chose » avait-elle dit.

Je n’avais pas prévu de prendre une photo, en effet, mon appareil photo n’était même pas entre mes mains à ce moment-là. Mais dès qu’elle s’est mise à parler, j’ai voulu capturer son portrait. Me voici face à cette femme, aussi ardente que le feu, me défiant de lui passer devant. Avec son énorme couronne de fleurs rouges sur la tête, elle me rappelait ce à quoi Frida Kahlo aurait pu ressembler à 70 ans.

Plutôt que de continuer mon chemin, je me suis assis à côté d’elle et ai pointé son cigare grossier et gigantesque.

« Tu fumes vraiment ça ? » lui ai-je demandé.

Elle a rigolé et confié que c’était seulement pour les touristes. « Ils aiment prendre des photos de nous, les vieilles femmes, avec des cigares énormes », a-t-elle affirmé. « Je ne peux pas me permettre de fumer tous les jours ».

Lorsque je lui ai proposé un Cohiba Esplendido, elle a accepté en souriant. Nous avons fumé ensemble pendant plus d’une heure, discutant de l’histoire et de son pays.

Lors de mon retour à Cuba l’année suivante, je lui ai rendu visite. Elle m’a invité dans sa maison, située près de La Bodeguita Del Medio, un lieu célèbre pour ses mojitos traditionnels. Elle a affirmé que l’institution avait ouvert la même année que sa naissance.

A mes yeux, Elva incarne l’esprit cubain. Elle était sans futilités à la première rencontre, mais une fois que la confiance s’était installée, les portes se sont ouvertes sur une amitié pour la vie. Malheureusement, elle est décédée quelques années plus tard. Aujourd’hui, chaque fois que j’ouvre une boîte de Cohiba Esplendidos, je pense à elle et à sa personnalité inoubliable.

DANIEL

En tant que photographe de portrait de voyage, j’ai parcouru le monde. Curieusement, plus je voyage, plus je me rends compte qu’il existe des liens partout. Ces connexions humaines rendent le monde plus petit.

J’avais remarqué Daniel lors d’une de mes balades photographiques dans une petite ville cubaine. Sa chemise rose avait attiré mon attention et j’appréciais son style. Je l’avais interpelé pour lui demander si je pouvais capturer son portrait. Nous avions fini par passer une heure à discuter et à fumer, en plein milieu de la rue.

J’ai été surpris d’apprendre que cet élégant gentleman de 85 ans s’était rendu au Vietnam en 1975. Ingénieur de métier, Daniel était venu pendant sept mois afin de construire un hôtel à Hanoi. Il s’agissait d’un cadeau pour le Vietnam, de la part du gouvernement cubain, suite à la victoire du pays. Daniel était présent à l’inauguration, avec nul autre que Fidel Castro lui-même.

Désormais, je revois Daniel tous les ans pour lui remettre de l’argent, issu de la vente de ses portraits. Nous dînons ensemble, apprécions quelques Cohibas et partageons nos anecdotes de Cuba et du Vietnam. Il m’a confié que son rêve était de revisiter le Vietnam avant de mourir. Je reste ému par son estime et son amour pour le pays et le peuple vietnamien.

FRANCISCO

Cuba possède le plus long train électrique d’Amérique du Sud. Il va de la côte est du port de La Havane jusqu’à Matanzas. Je suis monté dans le train pour admirer la campagne d’un angle différent et me suis arrêté dans une toute petite ville.

J’ai aperçu un gentleman assis sur un banc, devant un mur parfaitement vert, et ai aimé son visage. A ce moment-là, il était en train de fumer des cigarettes, je lui ai donc demandé s’il souhaitait fumer un cigare.

« Bien sûr, je suis cubain », avait-il répondu.

Il m’a déclaré qu’il s’appelait Francisco et m’a présenté son ami Emilio. Nous étions tous les trois en train de fumer, en regardant le trains s’en aller. J’ai eu la tristesse d’apprendre qu’il est décédé quelques années après. Son portrait me rappelle l’esprit du peuple cubain.

Prendre le temps à Cuba

Tôt le matin, lorsque je me promène dans la Vieille Havane, tout semble ralentir à Cuba. Parfois, on a l’impression que le temps s’est tout simplement arrêté.

PHOTOGRAPHIC JOURNEYS IN CUBA 14 1

Le temps que je passe à Cuba est différent de mes autres voyages photographiques. Je n’y passe pas dix heures par jour à courir après la lumière et à trouver des modèles comme je le fais ailleurs. Je laisse le moment venir comme il se doit. Ma journée commence à 5h du matin lorsque je photographie la lumière traversant les bâtiments. Je continue à prendre des photos lorsque les commerces commencent à ouvrir et que les gens remplissent les cafés. Ensuite, je me rends parfois au Malecón, l’avenue de bord de mer la plus célèbre de Cuba. Vers 8h, la lumière se lève derrière les pêcheurs qui récupèrent leur prise du jour.

Le soir, El Malecón devient une promenade. Là, les amants se baladent, les musiciens chantent des sérénades aux passants et les gens se détendent le long de la digue, comme s’il s’agissait d’une extension de leur propre maison.

PHOTOGRAPHIC JOURNEYS IN CUBA 15 2

La Havane est un musée en plein air, rempli de couleurs délavées mais toujours inattendues. Les vieilles voitures et les balcons effrités créent d’excellents arrière-plans pour tout modèle.

Il existe des entrées de bâtiment qui, lorsque je passe devant, me donnent l’impression d’entrer dans un monde secret. Les centaines d’années de couches de peinture et de vieilles affiches ont chacune une histoire à raconter.

Après quelques heures de photographie, je vais habituellement à La Casa del Habano prés de l’Hotel Nacional, vers 11h. Parfois, Edel m’accompagne et nous nous installons pour de longues conversations. Nous choisissons nos cigares parmi les milliers de disponible dans des caves qui s’étendent du sol au plafond. Puis, nous nous noyons dans des canapés en cuir et prenons le temps de profiter du rituel d’allumer le cigare et de prendre une bouffée. La lumière filtrée à travers la fumée est plus douce et plus lente, tandis que j’expire et profite de la belle vie à Cuba.

Vous aimez l’une de ces photographies ? Visitez notre Boutique en Ligne